Lorsque j’ai feuilleté, pour la première fois, l’épais livre de Sarah Rose, D-Day girls, je me suis dit, à moi-même, "encore un roman historique sur les résistantes". Mais, en y regardant de plus près, j’ai constaté l’absence de dialogues. J’ai alors commencé à lire le premier chapitre qui m’a tout de suite plongé dans le cœur du sujet, tant par l’élégance de l’écriture, le talent de conteur, le souci du détail et la preuve d’un réel travail historique et journalistique. Ce livre n’est donc pas une fiction.
En effet, l’auteur, Sarah Rose est une
journaliste américaine, conférencière, ancienne chroniqueuse pour le Wall Street Journal,
diplômée, au surplus, du Harvard College et de l’université de Chicago. Rien n’est
placé au hasard dans ce livre. Ainsi, lorsqu’elle décrit l’une des protagonistes, Odette
Sansom, au « teint frais », une note renvoi en fin d’ouvrage. Elle
nous indique que ce détail, « teint frais », a été trouvé dans un
carton des National Archives et n’est nullement une invention de sa part. Les
descriptions des lieux (Londres, Blois, Bordeaux, etc.), des personnes,
témoignent de recherches colossales qui donnent presque à D-Day girls la
dimension « d’un roman » qui n’en est pas un. C’est pourtant un livre
d’une rigueur historique qui me parait inattaquable.
L’essence de l’ouvrage parle de ces 39 femmes qui ont
quitté, volontairement ou involontairement, vie et famille, pour rejoindre, en
tant qu’agents féminins, le Special Operations Executive (SOE) britannique et devenir
ainsi saboteuses en France afin de « préparer l’opération
qui fera définitivement basculer le sort de la guerre, le Débarquement de
Normandie ». « Une sur deux sera capturée, une sur trois ne reviendra
pas. »
L’ouvrage se consacre essentiellement aux figures féminines du SOE que sont Andrée Borrel, Lise de Baissac, Odette Sansom, Yvonne Rudellat ou encore Mary Herbert, mais il demeure de nombreux autres protagonistes de premier ou second ordre. D-Day girls s’appuie sur un corpus de sources impressionnants, une volumineuse bibliographie, une multiplicité des témoignages, etc. qui en font un livre très complet en ce domaine. Par ailleurs, Sarah Rose veut démontrer que les propos de l’historien de la guerre Max Hastings, qui qualifie les publications sur les agents féminins du SOE de « bla-bla romantique », ne tiennent pas la route, et elle y parvient sans mal.
Comme nous l’avons dit plus haut, rien n’est laissé au hasard. « Tout
ce qui apparaît entre guillemets provient de sources originales, parlées,
écrites et rapportées par les protagonistes. » Et, comme le précise l’auteur
« les sources peuvent, intentionnellement ou non, avoir raconté les
événements d’une manière intéressée. »
Pour finir, Sarah Rose a souhaité rendre son livre cohérent,
le plus clair, le plus vivant possible, afin qu’il fasse sens.
Nul besoin de vous dire qu'il s’adresse à tous les
publiques par son accès facile.
Une très belle réalisation, sublimée par la traduction de l’anglais
par Sylvain Savarin.
Sarah Rose, D-Day girls, éditions Blueman, 2024, 420 pages,
20 euros