mercredi 28 août 2019

LIVRE : SORCIERES LA NUIT FURIES LE JOUR, aviatrices russes 1941-1945 de Martine Gay (Mots-clés : Russie, aviation, aviatrice, guerre patriotique)

 
Avec Sorcières la nuit furies le jour, Martine Gay, auteur et aviatrice, propose ici de nous faire découvrir, dans la série Femmes dans un ciel de guerre, les aviatrices russes de la seconde guerre mondiale. L'ouvrage est bien mené, une approche de l'aviation russe de l'avant guerre nous ouvre les portes du sujet avec un long arrêt sur le « vol du Rodina », raid aérien féminin sans escale de Moscou à l'extrême Orient, mené de main de maître  par Valentina Grizodoubova, Denissovna Ossipenko et Marina Mikkhailovna Raskova. Raid réalisé en 26 heures 29 minutes sur une distance de 6 450 kilomètres en suivant l'itinéraire et de 5 947 kilomètres en ligne droite. Exploit que félicitèrent Staline et Molotov.



Puis on entre dans le vif du sujet avec la guerre contre l'Allemagne et la formation de trois régiments féminins d'aviation :

586e régiment de chasse « faucons » ;
587e régiment de bombardement en piqué « furies du jour » ;
588e régiment de bombardement de nuit « sorcières de la nuit ».

Outre l'historique de ces trois régiments, Martine Gay présente plusieurs femmes pilotes ayant appartenu à certains de ces régiments comme Galina Brok Beltsova (587e régiment) ou Irina Rakobolskaya (588e régiment). Sont aussi abordées d'autres figures comme l'arménienne Rosa Tachat Abrahamyan pilote de chasse au 586e régiment d'aviation. Un bref chapitre relate les rapports entre les « sorcières de la nuit » et les français libres de l'escadrille « Normandie-Niémen ».

Notons qu'il s'agit ici du troisième livre paru en langue française, depuis 1993, sur les femmes pilotes russes de la seconde guerre mondiale. En effet, en 1993 était publié Les Sorcières de la nuit de Bruce Myles traduit de l'anglais par Pierre Saint-Jean. Plus surprenant, en 2005, Valérie Bénaïm (celle de la télé !) et Jean-Claude Hallé pondaient le roman La Rose de Stalingrad. « Roman-document » retraçant l'histoire véridique de Lily Litvak pilote de chasse à seulement 19 ans.



Au regard de ces deux précédents ouvrages, que nous apporte l'ouvrage de Martine Gay ? Tout d'abord une belle iconographie souvent inédite parfois provenant du musée de l'Air et de l'espace, ensuite des focus sur des pilotes peu connues, enfin des témoignages nouveaux puisque récupérés en Russie auprès des vétérantes.

Un livre intéressant et complémentaire que nous conseillons.


Martine Gay, Sorcières la nuit, aviatrices russes 1941-1945, éditions JPO, 2018 (19,90 €)

mardi 27 août 2019

Nouveautés livres : Valérie André par Martine Gay et Une section d'ambulancières au Tonkin, 1947-1950, par Claude-Jean Blanchard (Mots-Clés : guerre d'Indochine, ambulancières, ambulance, convoyeuse)


L'auteur de Valérie André : seule à bord pour sauver des vies !, Martine Gay, a le mérite d'avoir rencontré Valérie André « ventilateur », ainsi que nombre de ceux qui l'ont côtoyée à l'époque, comme le médecin-colonel Hantz ou le capitaine Santini. Pour autant, le livre, qui aurait pu merveilleusement compléter ceux publiés par Valérie André, en 1954, Ici Ventilateur ! et Madame le Général, en 1988, est confus, avec de longues digressions sur l'Indochine ou des personnages comme l'amiral Ernest Fauque. Certains diraient sans doute « hors sujet » ou trop de redondances. Ce que l'on aurait aimé c'est davantage de récits inédits sur Valérie André.
Une chose est certaine l'auteur y a mis tout son coeur, et c'est tout de même le plus important.



Martine Gay, Valérie André : seule à bord pour sauver des vies !, éditions JPO, 2019 (19,90 €)

Un autre ouvrage, de Claude-Jean Blanchard, Une Section d'ambulancières au Tonkin, 1947-1950, aborde lui aussi le sujet des femmes dans la guerre d'Indochine. Ce premier tome, car il y en aura un deuxième, présente Aline Lerouge (1908-1950), au destin tragique, chef charismatique de la section des ambulancières du Tonkin, ainsi que Marguerite Helluy (1920-2009), autre ambulancière exceptionnelle qui fit quatre séjours consécutifs en Indochine. Les parcours commencent avec l'engagement de la seconde guerre mondiale, s'arrêtent longuement sur l'Indochine et pour Marguerite Helluy se termine en Europe. 

 

L'auteur, Claude-Jean Blanchard, né à Aurillac en 1936, ancien enseignant de l'enseignement public secondaire, administrateur du musée militaire de Périgueux depuis 1971, a réalisé là un extraordinaire travail de recherche : bien documenté, bien construit, fourmillant d'informations nouvelles, d'une parfaite bibliographie et d'une riche iconographie.

Ce merveilleux livre, il faut le souligner, est disponible exclusivement chez Amazon, pour une somme modique.

Claude-Jean Blanchard, Une Section d'ambulancières au Tonkin, 1947-1950, auto-édition, 2019 (9,36 €)

PAROLE A : Frédéric PINEAU (mots-clés : femmes militaires, guerrières, amazones, infirmières, croix-rouge)

  
 Qui est derrière ce blog ?
C'est un blog que j'ai créé il y a une dizaine d'années dans l'optique de faire la promotion de mes livres et de faire partager ma passion des femmes militaires. Au départ nous devions être deux ou trois, mais grâce à cette ouverture sur le monde due à internet des personnes se sont proposées pour écrire sur le blog. Soit nous signons de nos propres noms ou nous prenons des pseudos en fonction, et parfois pas de signature. Je suis le rédacteur en chef de ce blog.

Comment et pourquoi vous êtes-vous spécialisé sur le sujet des femmes dans la défense nationale et aux armées ?
Mon amour pour le sujet remonte à mes jeunes années où je m'intéressais à la l'histoire militaire et particulièrement à la seconde guerre mondiale. Je devais avoir entre 18 et 19 ans.
Dans les livres que je lisais sur la seconde guerre mondiale, de l'histoire bataille pour l'essentiel, il n'était pratiquement jamais fait référence aux femmes, les seules références trouvées étaient de rares photographiques ou quelques lignes les évoquant, mais guère plus. La curiosité m'a piqué, j'ai donc essayé de trouver des informations sur ces femmes dont on parlait peu. J'ai trouvé d'abord un premier livre Femmes militaires de Raymond Caire qui reste une référence en la matière. Dans ce livre, il y avait une riche bibliographie et pour approfondir le sujet, je me suis mis à rechercher les livres de cette bibliographie. Il ma fallait tous.

 

Étiez-vous bon en Histoire ?
Oui, très bon élève dans cette matière. Mon goût pour l'histoire c'est affermi grâce à mon frère qui était en fac d'histoire, grâce aux films qui passaient à la télévision, aux les livres qui trainaient à la maison, aux récits que me faisait ma mère sur Jeanne d'Arc ou bien Marie-Antoinette. Par ailleurs, nous avons un fort passé militaire dans la famille (Grande Guerre, seconde guerre mondiale, guerre d'Indochine et guerre d'Algérie, pour les guerres les plus récentes).

Comment vous documentez-vous pour le blog ?
Je me sers de mes propres archives et compare, et lorsque je le peux, je me rends dans les bibliothèques, les photothèques, les archives, etc.

Quel est votre parcours professionnel ?
Études en arts plastiques, j'ai travaillé un temps comme illustrateur. La faculté (Deug, Licence, maitrise et DEA en Histoire). Sans oublier un master en ingénierie documentaire aux Arts et Métiers. Pour résumer je suis historien et documentaliste. Et depuis, je travaille dans le domaine de l'information documentation et suis également auteur de beaux livres sur l'histoire des femmes et la Croix-Rouge française.

En quoi consiste votre collection ?
Certains parleraient de collection, mais je préfère le terme d'archive. Parce que je suis plus dans l'intention de conservation et de construction que dans une collection qui serait juste un amoncellement. L'objectif est de mettre en valeur ces différents objets pour qu'ils soient transmissibles sous une forme unique et non mercantile. En résumé c'est une collection intelligente qui se construit, s'emboîte petit à petit, pour former un ensemble cohérent et transmissible. J'apporte par ailleurs un intérêt tout particulier à se conservation préventive et curative. Ma collection se consacre aux femmes dans la défense nationale et en temps de guerre bien entendu. Mon objectif actuel lui trouver un écrin.

 

Avez-vous déjà rencontré des femmes en uniforme ?
Une bonne centaine depuis que je m'intéresse au sujet : deux guerres mondiales, guerres d'Indochine, de Corée, d'Algérie, occupation de Allemagne, etc. La première que j'ai rencontrée m'a pris au sérieux, car je connaissais le nom de toutes ses amies et l'histoire de sa formation automobile. Nous avions discuté comme deux vieux vétérans. Il y a bien longtemps. Les dernières rencontrées sont des PFAT des années 1970.

À quelle femme de l'Histoire pourriez-vous vous identifier ?
À Edmée Nicolle, la fondatrice des Sections sanitaires automobiles féminines en 1939, par son caractère volontaire, qui n'hésitait pas à bousculer ce qui était en place pour arriver à ses fins. Elle a réussi à faire tout ce qu'elle voulait. Une belle longévité 103 ans à son décès. J'ai eu la chance de discuter avec elle.


Quelle femme de l'Histoire vous a le plus marqué ?
Jeanne d'Arc. Une adolescente, jeune bergère qui transforme l'Histoire de France, bouleverse les règles et les interdits de l'époque, arrive à s'imposer aux grands par la foi, sans jamais tuer personne.
Je ne me suis pas spécialisé sur son sujet, car il a été moult fois étudié. C'est la figure tutélaire, parce que c'est la mère de toutes ces femmes qui ont servi durant les guerres. Au surplus, elle est la patronne des infirmières.


Cette passion est-elle chronophage ?
Elle le fut par le passé, car en revenant de chine, j'étudiais chaque photo, chaque insigne. Mais ce ne fut pas du temps perdu.

Avez-vous une passion autre que les femmes en uniforme ?
J'ai de multiples passions qui sont les livres, l'ethnologie, les châteaux, les sujets étranges comme la cryptozoologie, les contes et légendes, les parlers, les livres de cuisine, la nature, la vénerie, etc.

De quels livres êtes-vous l'auteur ?
Livres historiques, participation à d'autres livres en tant qu'auteur ou comme iconographe.
6 livres et nombre de participations : Femmes en guerre, tomes 1 et 2 ; Les Femmes au service de la France ; La Croix-Rouge française, 150 ans d'histoire ; Les Linh Tap, etc.

Quel est votre lectorat ?
Pour le blog : il est assez varié : beaucoup de passionnés de l'histoire des femmes en général et des femmes en uniforme en particulier ; les curieux ; les contacts ponctuels pour des conseils, journalistes, écrivains, étudiants, collégiens, etc.
Pour les livres : Essentiellement des collectionneurs, des historiens, des passionnés, les bibliothèques, les descendants de femmes des deux guerres mondiales, d'anciennes militaires et Croix rouge.

Quel a été votre plus beau succès en librairie ?
Mon livre paru pour les 150 ans de la Croix-Rouge française aux éditions Autrement, 10 000 exemplaires, véritable succès de librairie pour un beau livre (livre de grand format, illustré en couleurs, équilibre texte et images, fait pour être regardé et lu). Je crois qu'il en reste moins de 200 exemplaires.

Avez-vous déjà été conseiller pour un évènementiel ?
Oui, pour le théâtre et le cinéma, mais aussi pour les musées.

Seriez-vous disposé à animer des sujets historiques pour des écoles ou autres ?
Oui, je pourrais présenter mes livres, parler des sujets relatifs aux deux dernières guerres mondiales, présenter des objets d'époque pour rendre l'Histoire plus vivante et concrète. Je demeure ouvert à toute proposition intéressante, mais, il faut le dire, je ne travaille pas gratuitement.

Un dernier mot ?
Je suis ravi d'avoir exposé en quelques questions et quelques lignes ce qui a orienté ma passion et mon amour pour les femmes qui ont participé aux différents conflits ayant jalonné l'histoire de France de la guerre de 1870-1871 jusqu'à la guerre du golfe.



lundi 26 août 2019

SUJET : Des femmes guerrières sur les drakkars (Mots-clés : viking, drakkar, guerrière)

Les pages documentaires placent l’action à la fin du Ve siècle, soit bien avant les premières attaques vikings dans les îles britanniques ou l’empire franc. En effet, ces raids n’ont lieu qu’à partir de 787 (avec Portland, une île du sud-ouest de l'Angleterre) dans le domaine insulaire et de 799 en Aquitaine pour le continent.

Dans ces mêmes feuilles d’introduction, il est écrit que :

« Semblable à de nombreux codes antiques dont la loi salique des Francs survivra jusque sous Charlemagne, cette loi ordonne que seul le garçon aîné d’une fratrie hérite de son père, du paysan jusqu’au roi, ceci afin d’éviter le partage du pouvoir et des terres, ainsi que l’éparpillement du patrimoine familial, fut-il modeste ou princier ».



 C’est la première fois que je vois mentionné cette explication et, malgré mes recherches dans de nombreux ouvrages sur ces hommes du nord, je m’avoue incapable de la confirmer ou de l’infirmer. Pierre Bauduin, dans son remarquable livre Histoire des Vikings : Des invasions à la diaspora, paru en 2019 chez Tallandier, va chercher dans la littérature noroise, les portraits de certaines femmes au destin exceptionnel qui commandent des drakkars. On relève, page 184 de cet ouvrage, que :

« Des récentes découvertes archéologiques, telles que la figurine d’Hårby (Fionie), ou la présence d’armes dans les tombes féminines, ou les restes de "guerrières viking" dans l’une des tombes de Birka (Bj 581) suggèrent que la femme guerrière bien illustrée par les textes ne saurait être confinée uniquement dans une fiction littéraire et au monde surnaturel ». 



 Dans ces sagas, le personnage de la sorcière est assez présent et, dans la bande dessinée Alwilda, l'héroïne, affronte tant la sorcière Erika qu’un groupe de guerriers danois, commandés par Alf Krügger-le-cruel, qui arrivent sur leur drakkar. Notre héroïne Alwilda s’est faite pirate et son équipage est exclusivement féminin ; son titre de walkyrie elle le gagne en maniant l’épée et la hache. Des pages sont aussi consacrées à la construction du village côtier qui sert de refuge à Alwilda et ses compagnes, ainsi quà la vie quotidienne qu’elles y mènent. Le graphisme est très réaliste et les combats ne prennent pas des allures trop sanglantes, on a par contre pas mal de vignettes avec des corps de femmes largement dénudés. Alwilda (ou Avilda) n’est pas un personnage historique et elle n’apparaît que dans les légendes nordiques du XIIIe siècle. On trouve un dessin animé pour enfants qui évoque Alwilda, avec un contenu bien plus sobre que celui de cette bande dessinée :

https://www.youtube.com/watch?v=0953gVYf5EQ


Alwilda, La pirate de la Baltique, tome 2, Jean-Yves Mitton, Original watts, 2019, 64 pages 


Alain CHIRON