En mars 1914, Le Petit
journal titrait "Celles qu'on ne verra plus sur les champs de
bataille". Un dernier hommage à la "fin des cantinières"
qui n'eurent pas le mérite d'entrer dans la Grande Guerre avec leur
petite voiture. Le véhicule des cantinières est tout aussi
emblématique que leur fameux tonnelet tricolore. Moyen de transport
utilisé dès le premier Empire, le fourgon de cantinière, souvent
un simple chariot à ses débuts, évolue avec le temps.
En 1881, une note émanant
du ministère de la Guerre parait sur "la voiture de la
cantinière-vivandière" adoptée par décision ministérielle
comme voiture type pour tous les corps de troupe. Cette note est
approuvée le 24 août 1881.
Voici, en substance, ce
qu'elle dit :
"Afin d'amener une
uniformité, très désirable à tous les points de vue, dans les
voitures dont se servent les cantinières et qui sont quelquefois de
lourds et incommodes véhicules, difficiles à traîner en campagne
et encombrants lorsqu'il s'agit de les transporter par voies ferrées,
le service de l'artillerie a été invité à faire étudier une
voiture présentant des conditions de volume et de poids en rapport
avec les moyens de traction mis à disposition des
cantinières-vivandières.
Cette voiture, après
avoir été soumise, dans plusieurs corps d'infanterie et de
cavalerie, à des épreuves de roulement et des essais de chargement
qui ont donné des résultats satisfaisants, a été adoptée comme
type et au fur et à mesure du remplacement de leurs voitures
actuelles, les cantinières devront être munies d'une voiture
semblable ; en cas de mobilisation, elles ne pourront se servir
d'aucun autre modèle.
Afin de faciliter aux
intéressés la construction de leurs voitures pour l'industrie, il a
été établi des planches de dessin indiquant les données
principales qui devront servir de guide dans cette construction.
Toutefois, les cantinières pourront aménager l'intérieur de leur
voiture comme elles le jugeront convenable, mais elles seront
astreintes à se conformer aux dimensions extérieures du corps de
voiture et à na pas dépasser les poids de la voiture type, qui est
de 625 kilogrammes. Elles devront aussi faire peindre les parties
extérieures de la voiture et les roues à la couleur vert-olive,
employée par le matériel des équipages militaires, les ferrures
seront rechampies en noir. L'intérieur de la voiture et du cabriolet
pourra être peint en blanc, ou en gris clair ou en jaune foncé.
En outre, et afin de
permettre en campagne le remplacement des roues et des essieux qui
viendraient à manquer, ces principaux éléments de la voiture
devront être, de tous points, conformes aux modèles en usage dans
le matériel des équipages."
Cantinière-vivandière du 16e régiment d'infanterie. Derrière elle un fourgon réglementaire. |
Sur les flancs des
voitures de cantinières des marques peintes indiquent le nom de la
propriétaire, l'unité à laquelle elle appartient. Voici quelques
exemples :
Mme Crosnier cantinière
17e Regt de chasseurs
2e division de cavalerie
2e brigade
Equipages régimentaires
18e régiment
d'infanterie
15e corps
Baudoin cantinière
? bataillon
Ou encore :
Corps d'armée des
troupes coloniales
2e division
1re brigade
1er régiment
d'infanterie coloniale
1e bataillon
Mme ??? cantinière
Les informations sont
parfois plus courtes :
Mme Bonnot
cantinière-vivandière
9e dragons
Ou encore :
Mme Lafon cantinière
au
4e bat. d'artillerie à
pied
Une circulaire du 7 août
1883, du ministère de la Guerre, indique qu'en temps de guerre les
voitures doivent être attelées à deux chevaux :
"Les cantinières
qui consentiraient à faire l'achat d'un deuxième cheval, pourront
atteler leurs voitures à deux chevaux dès le temps de paix, mais il
doit être établi que cette acquisition est absolument facultative
et ne saurait leur être imposée comme une obligation."
Le 29 mai 1884, le comité
d'artillerie envoie aux corps de troupes la note suivante :
"Les essais faits
dans les corps de troupes sur le nouveau type de voiture de
cantinière-vivandière adopté le 3 juin 1880, ont permis de
reconnaître qu'un seul cheval suffisait pour l'attelage lorsqu'on
parcourait des chemins ou des routes ordinaires ; mais, comme la
voiture peut, en raison de sa capacité, recevoir un chargement plus
considérable et de nature à satisfaire plus facilement aux besoins
qui se produiront en campagne, il a paru nécessaire d'atteler à
deux chevaux , en temps de guerre, toutes les voitures des
cantinières-vivandières."
Ces diverses notes
laissent la porte ouverte aux interprétations et c'est ce que
montrent les photographies d'époque. Mais pas le temps de voir un
modèle fixe et définitif s'imposer. Les cantinières constatent que
leur métier disparaît inévitablement. En 1914 le journal
L'Excelsior publiait l'information suivante :
" Depuis quelques
années, les règlements militaires ne faisaient plus mention des
voitures de cantinières dans les trains de combat des diverses
unités. Mais on croyait volontiers, dans le public, qu'on les
verrait apparaître encore sur le champ de bataille et que, pour
avoir perdu le droit de porter leur pittoresque uniforme, les
cantinières n'en conserveraient pas moins la faculté de suivre nos
soldats en campagne."
Le ministère de la guerre donna la réponse suivante pour lever le doute :
"les cantinières en dehors du temps de paix, n'ont plus d'existence légale. A la première heure de la mobilisation, l'autorité militaire peut réquisitionner leurs chevaux et leurs voitures. (...) Et les cantinières peuvent tout au plus continuer d'habiter à la caserne leur logement habituel." Le chapitre est clos, la guerre le fera oublier.
Le ministère de la guerre donna la réponse suivante pour lever le doute :
"les cantinières en dehors du temps de paix, n'ont plus d'existence légale. A la première heure de la mobilisation, l'autorité militaire peut réquisitionner leurs chevaux et leurs voitures. (...) Et les cantinières peuvent tout au plus continuer d'habiter à la caserne leur logement habituel." Le chapitre est clos, la guerre le fera oublier.
"Ainsi se termine
officiellement la tradition des cantinières", conclue Le Petit
journal du 22 mars 1914.
Frédéric Pineau
Note : une bonne partie
des informations de cet article sont tirées du livre du capitaine
Richard, Cantinières et vivandières françaises, du Petit journal
et de L'Excelsior.
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