Peut-on faire un parallèle entre l'implication des femmes dans la guerre de 1870-1871 et celle des deux guerres mondiales. Assurément oui, même si le propos de Jean-François Lecaillon, docteur en histoire, spécialiste de la guerre de 1870-1871, est plutôt de mettre en lumière un engagement des femmes occulté, que la propagande patriotique de l'après-guerre a cantonnées « au rôle de victimes de la barbarie prussienne ». Car, l'élite sociale et intellectuelle de l'époque, toute chargée de préjugés sociaux et culturels, n'était pas prête à percevoir les femmes comme des actrices de la guerre. Il faut dire que cette implication est nouvelle. Et toute société rechigne à reconnaître les faits qui vont contre leurs idées préconçues ou la morale établie.
Dès le début de la IIIe république un nombre incalculable de livres a été publié sur la guerre de 1870-1871 : histoire bataille, études sur la presse, historiques de régiments, recueils de gravures, souvenirs photographiques, etc. Les femmes y sont les parents pauvres, même s'il existe une littérature souvent de la main d'auteurs masculins, rarement féminins. Les Femmes et la guerre redonne donc de la maille et du volume à une histoire morcelée et étouffée par les préjugés de la IIIe république. D'ailleurs, lors de l'écrasement de la Commune en mai 1871, la bonne société ne retiendra de cette courte guerre civile qu'une implication immorale de viragos, de prostituées, de pétroleuses,de femmes sans foi ni loi, qu'ils feront les parfaits porte drapeaux expiatoires de la révolte. Toute empreinte de préjugés sociaux et culturels, la bourgeoisie n'était pas prête à percevoir les femmes comme des actrices de la guerre. Il faut dire que cette implication est nouvelle. Et toute société rechigne à reconnaître les faits qui vont contre ses idées préconçues ou la morale établie.
Si 1870-1871 et 1914-1918 sont des guerres très différentes, il n'en est pas de même quant à l'implication des femmes, dans ces conflits, pour lesquelles de profondes similitudes se font jour comme le démontrent Jean-François Lecaillon ou Chantal Antier. Le rôle des femmes donne une dimension moderne, nouvelle et innovante à la guerre franco-prussienne. Les paysannes face aux contraintes, les espionnes, « les anges blancs », les institutrices, les combattantes, etc. tout y est. À cela prêt que pendant et après le premier conflit mondial, l'opinion n'aura de cesse de mettre les femmes en avant et de les encenser.
L'intérêt de cette étude poussée est de rendre pluriel cet engagement des femmes que l'on a souvent réduit aux cantinières et autres « pétroleuses » ; et d'ouvrir au lecteur une multitude de sources tant écrites qu'artistiques (tableaux, gravures, etc.). Il nous faut aussi signaler, une impressionnante bibliographie. Ce livre, outre le fait d'être agréable à lire, peut aussi être vu comme un merveilleux outil de travail tant les sources sont exhaustives et abondantes.
Le chapitre sur l'histoire des Françaises face à la guerre, est le miroir d'une diversité dans l'engagement : service aux blessés, ouvrières et entrepreneuses, militantes engagées, combattantes, etc. Parmi les combattantes on rencontre la future aventurière et archéologue qui a donné son nom à l'une des salles du musée du Louvre : Jeanne Dieulafoy. Femme d'exception qui comme George Sand ou Rosa Bonheur portera le cheveu court et le costume d'homme.
Les éditions Pierre de Taillac et Jean-François Lecaillon nous offrent ici un excellent livre.
LECAILLON (Jean-François), Les Femmes et la guerre de 1870-1871, histoire d'un engagement occulté, Paris, éditions Pierre de Taillac, 2021, 376 pp. 26,90 €
En 2016 les éditions Pierre de Taillac ont aussi publié L'Armée au féminin, ces femmes qui font l'armée française du XXIe siècle de Jean-Marc Tanguy. Des portraits sensibles de femmes combattantes des trois armées (terre, air, mer), mais aussi étrangères. Ce qui frappe, leur jeunesse, leur volonté et un amour du métier. Un très beau livre bien illustré.
TANGUY (Jean-Marc), L'Armée au féminin, ces femmes qui font l'armée française du XXIe siècle, Paris, éditions Pierre de Taillac, 2016, 176 pp. 22,90 €
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